[Rapport] Invasion des Drakes dans les Hauts du Nord

Invasion des Drakes dans les Hauts du Nord

Depuis quelques temps moi-même et mon époux Elendilme nous sommes installés à Esteldin. Si mon époux apprécie la vie au grand air et a lié quelques liens avec ces hommes taciturnes qui se nomment Rôdeurs ; pour ma part passer mes nuits au bivouac et dormir à la belle étoile ne me plaît guère.

Mon mari orienta ses recherches sur les ressources boisées de la région. Esteldin n’offrant aucune bibliothèque qui trouve grâce à mes yeux, je me suis orientée sur les recherches de terrain : quelques discussions avec la tribu des Suuri Iehmä me permirent d’aborder leur culture primitive de chasseurs-cueilleurs tandis que je nouais des liens plus enrichissants avec les Elfes installés à Tham Giliath.

Avec le temps les Rôdeurs se livrèrent à mon époux : s’ils craignaient les incursions orques de Dol Dînen, les Poings Bourrus réfugiés dans un camp près d’Othrikar, une menace plus dangereuse encore planait sur les Hauts du Nord. Depuis quelques temps les éclaireurs avaient repéré d’étranges traces autour de la route menant à Aughaire. Haut dans le ciel avaient été repérées des créatures étranges effrayant les habitants tandis que l’on trouva dans la campagne des cadavres de bêtes atrocement mutilées comme par d’énormes griffes. Fort heureusement peu d’esprits étaient dans la confidence, car si la populace eût su qu’un nid de Drakes était établi à quelques minutes de vol d’Esteldin, nombre d’habitants eurent fui dans la panique générale.

Je parlais plus haut de menace : menace double, car si les Drakes menacent la sécurité des habitants, la position de leur nid situé pratiquement sur la route reliant Aughaire à Esteldin est une place stratégique importante dans la bataille contre l’Ombre grandissante. Bien entendu, mon époux se porta volontaire pour explorer la zone en toute relative discrétion tandis que je l’accompagnais : d’une part je n’avais guère envie de le laisser seul en si mauvaise compagnie, d’autre part je dois avouer que ces créatures attisent autant ma curiosité que mon dégoût ou ma frayeur. Néanmoins il me semble que leur étude est d’une grande importance si nous souhaitons les annihiler.

La route fut semée d’embûches : ouargues et autres bêtes sauvages nous barraient la route. Bientôt notre localisation fut connue de tous alentours : pour nous défendre j’utilisais mes runes qui lançaient des éclairs aveuglants contre nos ennemis ce qui révélait de loin notre position. C’est ainsi que nous rencontrâmes Hashferth que le vacarme avait alerté alors qu’il faisait quelques repérages dans la région pour les Rôdeurs d’Esteldin. N’écoutant que son courage, il décida d’aider un aventurier dans le besoin. Peut-être eût-il préféré sauver une jeune demoiselle en détresse plutôt que deux elfes en vadrouille, mais la joie de nous revoir éclipsa toute contrariété. Connaissant l’enthousiasme d’Elendilme, Hashferth décida de se joindre à notre équipée jusqu’à la fin de la mission pour des raisons de sécurité.

Nous empruntâmes ensemble une passe étroite proche de la route menant à Aughaire gardée par quelques ouargues et araignées qui passèrent rapidement de vie à trépas. Bien que le soleil fût haut dans le ciel, ses rayons ne pouvaient égayer le décor lugubre où les Drakes avaient choisi de faire leur nid qui se dressait tout en haut d’une grande falaise où aucun arbrisseau ne pouvait planter ses racines dans la roche froide et nue.

Déjà quelques vers se dressaient devant nous : leur peau flasque et rosée n’ayant pas la dureté de leurs ainés, nous les éliminâmes assez facilement d’autant plus que les flèches d’Elendilme semblaient s’y enfoncer comme un couteau dans du beurre. Pour ma part j’usais de sortilèges de glace afin de ralentir leur progression afin que notre archer puisse les tuer bien avant qu’ils n’atteignent notre groupe. Le sénéchal préférait la discrétion et je l’ai vu plusieurs fois s’approcher subrepticement de ses victimes avant d’abattre sa lame létale au cœur ou au cou.




Je fus surprise et effrayée du nombre de vers se réchauffant au soleil; bien que je suppose qu’ils en arrivent à se manger entre eux et que seulement une poignée atteint l’âge adulte, j’ai cru remarquer que les hommes étaient au menu ; je supputais donc que si les vers en arrivaient un jour à atteindre les troupeaux d’Aurochs sauvages paissant non loin de leur antre, la région serait face à un problème majeur auquel il serait difficile de mettre fin. Si les Rôdeurs craignent les Drakes, je crois que leurs estimations de population sont bien en deçà de la terrifiante réalité.

Une fois le bas de la falaise nettoyé de ces horribles bêtes, nous gravîmes la montagne par un sentier serpentant entre de gros rocs qui semblaient avoir été jetés pêle-mêle ici et là par quelque géant enragé. C’est là que nous avons rencontré les premiers Drakes aux écailles rouges sang et à l’haleine enflammée. Flèches et lames ayant plus de difficulté à pénétrer leurs chairs, j’usais de quelques éclairs que je tentais de diriger vers les yeux des monstres avec plus ou moins d’efficacité. Nous fîmes quelques pauses pour prendre quelque repos et les rations que nous avait données Ferumson lors de sa visite au précédent marché disparurent dans nos estomacs. Pour ma part je pensais au Semi-Homme, à sa nature pétillante, généreuse et chaleureuse pendant que je mâchonnais ses biscuits et cela me redonna courage, bonne humeur et une volonté d’en découdre que je ne me connaissais pas.

Après nous être égarés dans des culs-de-sac et des passes hasardeuses regorgeant de reptiles juvéniles et adultes, nous atteignîmes le sommet : là nous attendait la femelle Drake accompagnée de deux de ses rejetons. Elendilme posa des pièges et décocha une flèche : peine perdue, les Drakes attaquèrent à distance en lançant contre lui leur souffle enflammé. Ce qui se passa ensuite fut plutôt confus pour moi. Chacune des créatures prit l’un de nous pour adversaire, aussi me retrouvais-je face à un rejeton particulièrement coriace. Je me souviens seulement d’avoir vu un instant Elendilme courant en tous sens tel un lièvre poursuivi par un chasseur tandis que la femelle lui courait après toutes ailes dehors ; derrière elle, lui aussi en courant, notre courageux sénéchal faisait de grands gestes afin de planter sa lame dans le dos de la bête ; son coup porta et la perfide reptile se retourna et lança un jet de feu si fort que je crus ne jamais revoir mon supérieur. Je détournais alors mon attention monopolisée par mon adversaire qui lançait contre moi ses griffes acérées. Une fois mort, j’aidais mes compagnons et nous sortîmes victorieux du combat, non sans mal. Si Hashferth survécut en se jetant au sol, celui-ci n’en sortit pas indemne car une vilaine brûlure s’étalait sur son bras.

Nous n’eûmes que trop peu de temps pour nous reposer car déjà s’approchait Naglangon, ainsi nommé par les Rôdeurs qui redoutent sa présence. Plus grand que les autres Drakes, plus fort et plus cruel aussi, la couleur de ses écailles d’un bleu marine profond le différencie de ses semblables. Il se posa avec élégance sur la falaise tandis que nous reculions vers un abri. Il huma le sol et inspecta le cadavre de la femelle Drake. C’est ainsi que nous le prîmes par surprise, de dos à un moment où il ne s’y attendait pas. Fou de stupeur et de colère ses gestes furent désordonnés : il ne savait pas quel assaillant attaquer dans cette embuscade impromptue. Il s’écroula enfin, mort, la gueule ouverte et encore fumante des flammes qu’il avait lancé contre nous. Forts de notre victoire nous rentrâmes à Esteldin prévenir les Rôdeurs du danger qui les menaçait. Pour ma part je n’eus qu’un regret : ne pas avoir eu l’opportunité de voler un œuf de Drake afin de pouvoir étudier le processus de développement des ces bêtes.